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MARFFA LA CORSE


Une villa baptisée « La Jungle », à Loubillé (sud des Deux-Sèvres, canton de Chef-Boutonne), cela ne peut qu’amuser le touriste en vadrouille. Mais la population n’a pas oublié les rugissements des lions qui semaient la terreur chez les enfants pendant la seconde guerre mondiale, « jusqu’à dix kilomètres aux alentours selon le vent » disent-ils. Nous n’aurions guerre porté attention à cette villa si, en mai 2008, Patrick Ricard n’avait déniché un exemplaire du Petit Courrier (ancien Courrier de l’Ouest) paru le 6 mai 1941. Un article était consacré à Marffa la Corse qui avait installé sa ménagerie « La Jungle » sur la place de la Brèche à Niort. De là est partie l’envie de pister cette dompteuse qui deviendra une star internationale. Tout au long de notre périple, nous sommes allés de surprise en surprise, souvent nous avons dû trier le vrai du faux, remettre à leur juste niveau certaines informations, collecter des témoignages, et nous devons beaucoup à la chaîne de solidarité des gens du cirque. Nous avons pu franchir la porte de cette grande famille où nous avons été reçus avec beaucoup de chaleur et d’amitié.

 

Le lecteur aura sans doute l'impression de déjà lu en parcourant ces pages : mais nous avons voulu reproduire toutes les sources et noter les différences. Un exercice amusant !


Nous pourrions dérouler la vie de Marffa la Corse chronologiquement, mais cela enlèverait beaucoup de piquant à cette histoire. Nous allons tenter de restituer cette aventure peu banale, à peu près dans l’ordre où nous l’avons découverte. Une enquête déroulée au galop sous l’impulsion d’un coup de fouet. Où se mêlent souvent vérité et boniment. L’historien s’en arrachera parfois les cheveux. Mais jamais il ne critiquera les camelots et les circassiens, parce qu’ils savent toujours nous faire rêver, de notre plus tendre enfance à nos derniers instants.

 

Nos recherches ont débuté après la découverte de cet article de M. Martin, journaliste en juin 1941 au Petit Courrier 1. Article que nous allons reproduire ci-dessous et faire suivre du compte-rendu du spectacle.

 

Lors de la rédaction de l'ouvrage sur Loubillé, nous ne savions pas l'existence de cet article de M. Sarrazin pour l'Ouest Eclair paru en avril 1936. En voici un extrait. La photo est celle de Marffa la Corse tenant sur elle un magnifique serpent boa.

 

"Ouest Eclair 9 octobre 1936 Niort
La célèbre dompteuse «Marffa la corse» est une enfant des 2-Sèvres
Que de gens se sont arrêtés, dans la journée de mardi, devant la célèbre ménagerie «La Jungle», dont la tente se dressait en bordure gauche de l'allée centrale de la place de la Brèche. Un puissant pick-up lançait très loin à la ronde ses appels musicaux. Et quand il s'arrêtait, c'était pour céder la place au speaker annonçant la représentation.  Contrairement aux établissements de ce genre. il y a peu de mise en scène la «Jungle». Mais, par contre, les «patrons», le dompteur Georgio, le maitre des fauves, et la dompteuse, Marffa-la-Corse, procurent à leur public qui pénètre sous la tente, le plus complet et le plus émouvant des spectacles. Un bureau-caisse, seul, indique l'entrée de la ménagerie. Au micro se tient le dompteur, et les tickets d'entrée sont distribués par Marffa, en livrée rouge et blanche. Un singe, cependant, se balance au  haut d'une échelle, et, quelquefois, une toute jeune fillette invite les curieux à entrer.
Ce n'est donc point une présentation aussi simple qui pouvait inciter les promeneurs à se rassembler devant la ménagerie. Seulement, les paroles que prononçait le speaker intéressaient au plus haut point les gens de chez nous. Le dompteur Giorgio ne précisait-il pas, en effet, que Marffa-la-Corse était originaire de Chef-Boutonne ? Et aussitôt, une cinquantaine de personnes se pressaient pour tâcher d'apercevoir, et quelques-uns même pour reconnaitre la célèbre dompteuse qui, depuis 13 ans, a quitté son village natal (donc environ depuis 1923).
Le silence s'était fait sur cette place de la Brèche qui, toute la journée durant, avait connu un vacarme épouvantable. La nuit était venue. Et déjà les attractions fermaient, pour rouvrir après l'heure du dîner.
A cette heure tardive, la curiosité me poussa jusqu'à «la Jungle». Je voulais demander une courte interview à Marffa, l'enfant du pays, que j'avais vue, quelques instants auparavant, à travers les barreaux de fer d'une cage, aux prises avec ses lions. Malgré les fatigues de la journée, et bien que ce fut l'heure de son dîner, la dompteuse me reçut fort aimablement. Avisée de mon arrivée par son mari, elle m'attendit sur le seuil de sa roulotte. Grande et belle femme, le front orné d'une mèche de cheveux disposée en point d'interrogation, Marffa, a, dans le regard, quelque chose de pénétrant. A la voir, on ne doute plus du tout qu'elle puisse tenir tête à ses 15 lions, qu'elle sait rendre dociles et soumis. Née à Montalembert, petit pays situé à proximité de Chef-Boutonne, dans le Mellois, Thérèse Rouffin se maria à l'age de 16 ans (faux, elle ne s'est jamais mariée). Elle quitta le domicile paternel, où continuent encore aujourd'hui de vivre ses parents (son père est en fait décédé depuis longtemps) et un frère, et, en compagnie de son mari, M. G. Vignolles, partit à l'aventure. Les débuts furent modestes. Le ménage commença avec des singes, et, peu à peu, la ménagerie se monta pour arriver finalement posséder 15 lions et une demi-douzaine de hyènes.
- Comment avez-vous eu l'idée de devenir dompteuse ?
- J'aime le danger. Cela me passionne de voir devant moi, enfermés avec moi, dans une même cage, des fauves que je sais terribles. Je me rends compte que la moindre imprudence de ma part peut me coûter la vie, mais cela me plait et me grise.
Durant sa carrière de dompteuse, Marffa n'a été blessée qu'une seule fois par un lion qui s'était jeté sur elle. Mais ce fut bénin.
- D'ou vient le surnom de Marffa-la-Corse ?
Un sourire plissa les joues de la dompteuse.
- J'aime beaucoup la Corse, me répondit-elle. J'y retourne, chaque année, avec plaisir. Je suis sortie victorieuse d'un concours qui se déroula à Ajaccio. Et ce fut ce succès qui me valut le surnom de Marffa-la-Gorse.
Mais, chose extraordinaire, bien qu'étant originaire des Deux-Sèvres, Marffa n'est venue à Niort que deux fois depuis qu'elle parcourt ainsi la France. La première fois, ce fut à l'occasion de la foire de mai dernier, et la seconde, il y a 3 jours. Mercredi matin, un gros tracteur emmenait vers la Bretagne la «Jungle» et ses fauves. La dompteuse Marffa-la-Corse et le dompteur Giorgio emportaient de Niort un bon souvenir et se promettaient d'y revenir.
Pierre SARRAZIN."
 

 

Revenons maintenant sur la place de la Brèche à Niort en 1941 !

 

En marge des attractions foraines

« Le dompteur Georgio voulait retourner à la terre, mais… Marffa la Corse, prise par l’ambiance des fauves, voulait poursuivre sa carrière de dompteuse. Georgio voulait exploiter sa ferme, et sa femme Marffa la Corse ne pouvait vivre qu’au milieu de ses lions et de ses bêtes féroces. Telle est l’odyssée de ce couple de dompteurs bien connu, qui depuis le début des hostilités exploitait une ferme modèle dans les Deux-Sèvres, à Loubillé, près de Chef-Boutonne. Georgio, le Vignolles pour les initiés, ne pouvait voyager avec ses fauves, aussi avait-il conçu le projet d’installer avec sa famille une ferme modèle dans le sud du département. Il mit son projet à exécution et depuis un an, pour lui, mais pour lui seul, poules et lapins avaient remplacé lions, tigres et panthères. Cette transformation lui allait à merveille et manier la pelle et la pioche dans son jardin lui était devenu aussi familier que le fouet ou le revolver dans sa ménagerie.

 

marfa_1933.jpg


Pour Marffa la Corse, cette femme étrange au regard doux pour ses semblables, mais d’acier pour ses fauves, ce n’était pas la même chose. Connaître à nouveau la vie de la campagne après avoir goûté cette vie d’aventure et de risques au milieu de bêtes féroces, lui était devenu insupportable et c’est pour cela que le ménage de dompteurs est venu monter son attraction foraine, « sa jungle » sur la place de la Brèche.

Nous avons été rendre visite à ces sympathiques dompteurs, à leur voiture roulotte, et c’est très aimablement que le petit homme aux yeux d’acier, plus connu sous le nom de Georgio, nous a reçus.

- Si c’est pour la culture, nous dit-il, je suis à vous, quant à « la jungle » voyez Marffa la Corse.

- Vous n’êtes donc plus dompteur ?

- J’ai juré que je ne rentrerai plus dans une cage. Maintenant je me livre au jardinage. Vous seriez passé cinq minutes plus tard, vous ne me trouviez pas, j’allais repartir pour Chef-Boutonne dans ma ferme. Je suis venu à Niort monter la ménagerie et c’est tout.

- Vraiment ! Ce n’est pas possible, un homme qui a passé toute sa vie au milieu des fauves, qui n’a pas reculé devant des blessures quelquefois graves. Et vous, Madame, dis-je à une personne qui se tenait également dans la voiture et que j’avais reconnue pour être Marffa la Corse ?

- Moi, me dit-elle, c’est autre chose, je ne peux pas me passer de mes fauves, il faut que je vive au milieu d’eux. A la seule pensée que bientôt je vais me retrouver avec eux, cela me comble d’aise et je me sens revivre.

- Vous les aviez donc complètement abandonnés ?

- Oh non, mais ce n’est pas la même chose. Pénétrer dans la cage, fasciner un lion, le dompter du regard jusqu’au moment où il vient se coucher à vos pieds, cela est prenant. Vous comprenez, j’aime mon métier et c’est tout dire.

- Si ce n’était pas se montrer trop indiscret, votre nom de Marffa la Corse ?

- Mais certainement, c’était en 1926 au concours international d’Ajaccio, où je présentais un numéro extrêmement périlleux au milieu des lions, on m’avait surnommée Marffa la Corse. Depuis, j’ai conservé cette appellation.

- Et maintenant, pouvez-vous me parler du programme que vous allez présenter au public niortais pendant la foire ?

- Ce que je peux vous assurer c’est qu’il sera inédit, parce qu’en effet, le lion Pacha qui m’a blessé dix-huit fois ; la lionne Mado qui s’est jetée sur un militaire à la foire de Paris et la lionne Mignonne qui a complètement déchiqueté un dompteur, n’ont pas travaillé depuis 1939 et je me demande très sincèrement comment nous allons faire, le dompteur Willy2 et moi, pour en venir à bout. Rien que cela promet du spectacle et personnellement me plaît. Mais nous aurons aussi une attraction inédite avec « la poupée de Paris » une jeune artiste de douze ans, qui mime à la perfection Maurice Chevalier, Fernandel, Bach, etc. Elle dansera et chantera devant la cage aux lions, et même dedans.

Souhaitons donc que la ménagerie « La Jungle » connaisse le succès qu’elle mérite et qui se base sur plus de 25 années passées au milieu des fauves. - P. Martin.

La suite de notre enquête nous prouve que les propos de Georgio3 sont toujours à prendre avec des pincettes. En effet, « La Jungle » était déjà installée à Niort depuis le début du mois d’avril comme le confirme une lettre de l’hôpital-hospice de Niort en date du 16 mai 1941, laquelle atteste qu’une représentation avait déjà été donnée le lundi 12 avril 1941 aux enfants et aux vieillards. Georgio qui prétendait ne plus vouloir s’attarder avec les fauves, se retrouvait à nouveau « en pleine jungle » comme l’indiquent les communiqués suivants.

 

Le journal  La France  annonce un spectacle le 13 mai 1941.

« Une représentation au profit du secours national aura lieu demain à la ménagerie « la Jungle ».

C’est mercredi, à 20 heures, qu’une représentation de gala offerte au profit du Secours national sous la présidence de M. le Maire et de . M. Louis Bondot, président du Secours national, aura lieu à la ménagerie « La Jungle » place de la Brêche. Au cours de cette soirée, les spectateurs pourront applaudir la Poupée de France qui remporte chaque jour un brillant succès ; Martha4 la Corse la dompteuse renommée ; Ulah5 la fille de la Brousse ; Willy le dompteur des grands cirques européens et différents artistes. La séance commencera à 20h30 très précises.

Il nous est particulièrement agréable de remercier Georgio, le sympathique directeur de « La Jungle », qui met ainsi son établissement à la disposition des oeuvres sociales. Lundi, dans l’après-midi, M. Georgio a donné une représentation gratuite pour les jeunes orphelines et orphelins de l’hôpital. Une centaine d’entre eux y ont assisté et se sont vivement intéressés aux travaux de la ménagerie.


Assurément, Georgio veut se concilier les bonnes grâces du préfet, des élus, de la presse, de la population. Tout en multipliant les spectacles… Et les recettes.

Le journal La France publie le 16 mai 1941 l’article qui suit.

 

« Au profit des prisonniers de guerre »

La direction de la ménagerie « La Jungle », place de la Brèche, donnera aujourd’hui à 20h, une représentation au profit des prisonniers de guerre niortais. Nos concitoyens auront à cœur de contribuer généreusement au succès de cette soirée.

C’est ce soir vendredi à 20h30 qu’un grand gala est organisé au profit des prisonniers de guerre niortais, sous la présidence de M. le Préfet des Deux-Sèvres, Me Debern président du comité des prisonniers des Deux-Sèvres, et de M. Lelant, président du comité des prisonniers de guerre niortais…


Le Petit Courrier relate ce spectacle dans son édition du dimanche 18 et lundi 19 mai 1941. A noter que deux photographies illustrent cet article, l’une figure Paulette, dite « La Poupée de France », en tenue de scène, l’autre révèle Charles Simonnet, 21 ans, garçon au Café du Cercle.

 

lola.jpgLola ou La poupée de France.


« Pour nos prisonniers, une belle représentation à la ménagerie « La Jungle »

Pour la seconde fois en ce début de semaine, Georgio et Martha la Corse, directeurs de la ménagerie « La Jungle », et leur personnel, ont donné, vendredi soir, sur la place de la Brèche, où, depuis la foire ils sont installés, une grande représentation de bienfaisance.

Celle-ci eut lieu en présence de M. Bouché-Leclerc, préfet des Deux-Sèvres, aux côtés de qui avaient pris place M. Raymond Bézias, son chef de cabinet ; M. Félix Lelant, adjoint au docteur Panou, maire de Niort, en même temps président du comité d’assistance aux prisonniers niortais et M. Fernand Deberne, président de l’Union départementale des prisonniers de guerre.

Malheureusement, l’établissement de M. Georgio ne devait pas connaître cette soirée là, la grande affluence sur laquelle on était en droit d’espérer. Le spectacle annoncé promettait, certes ; à notre avis il valait mieux que cela.

Miss Paulette, dite « La Poupée de France » (âgée seulement de douze ans) a entamé le programme par ses imitations des plus grands artistes de la scène et de l’écran, interprétant à ravir et avec un réel talent, les répertoires les plus variés, puis vêtue d’une seyante toilette blanche, elle s’est livrée à de gracieuses exhibitions de danses, certaines d’entre elles du programme de la célèbre artiste noire Joséphine Baker. Tour à tour, ce fut alors à une jeune dompteuse6 de 15 ans, de se présenter avec sa pensionnaire, une hyène et au dompteur Willy de se produire avec son ours brun et ses lions du Bengale. Matha la Corse et Georgio clôturèrent de belle façon la représentation, la première au cours d’un exercice de dressage avec la lionne « Mignonne », le directeur de la ménagerie dans une représentation qui fut très goûtée avec M. Charles, garçon du café de Niort.

Le produit des entrées et des quêtes ont produit une somme de 660 francs qui a été mise à la disposition du Comité Niortais d’aide aux prisonniers. »

 

Voilà tel qu’il se présentait au milieu de l’année 1941, le programme de « La Jungle ». Et déjà apparaissent bien des contradictions et des zones d’ombre que nous avons souhaité clarifier. Commençons donc par rendre une visite à Marffa la Corse, Georgio et leurs deux filles. Ce n’est déjà pas banal.


Grâce à Marcel Ducoin, généalogiste de renom né à Chef-Boutonne, qui nous a aiguillés avec la plus grande gentillesse, nous avons pu partir de suite dans la bonne direction. En effet, il a bien connu la famille de Marffa la Corse, et plus particulièrement sa mère Angèle, dont il a racheté la petite maison à Javarzay en 1945. En fait, Gaëtan Rouffin, neveu de Marffa rectifie en 2011 : "Mr Ducoin à acheté la maison de mon grand père Henri (frère de Marffa) en 1984 ou 1985 pour la détruire et non celle de Angèle".

 

En 1936 (comme à la fin de la guerre), Marffa la Corse ne cachait pas encore ses origines Deux-Sèvriennes. La preuve avec cet article extrait du journal Ouest Eclair  publié en 1936 à Niort, et que nous avons retranscrit plus haut.

 

1Capture1_9_10_1936_ouest_eclair.JPG2Capture1_9_10_1936_ouest_eclair.JPG3Capture1_9_10_1936_ouest_eclair.JPG4Capture1_9_10_1936_ouest_eclair.JPG

 

Marffa la corse a du sang charentais

 

Marie-Thérèse Rouffin, alias Marffa la Corse, est la fille d’une Charentaise. Contrairement à ce qu’elle tentera de faire croire souvent, Marffa est originaire du canton de Sauzé-Vaussais. Son nom de cirque est certainement inspiré par celui de Martha la Corse  femme belluaire de grande valeur aînée de Marffa d'une dizaine d'années (lire chapitre correspondant). En effet, Marffa la Corse (Marie-Thérèse Rouffin) est née en 1908 à Montalembert de l’union d’un vieux maçon de cette commune, François Rouffin (1834-1911), veuf et âgé de 66 ans, avec la jeune Angèle Renaud (1874-1944), 25 ans, célibataire et originaire des Adjots. Ils s’étaient mariés dans l’urgence le 16 décembre 1899, leur premier enfant Fernand naîtra le 11 avril 1900 à Montalembert. Suit Constant, né le 16 janvier 1906 à Montalembert où il décède le 27 septembre 1908, Marie-Thérèse née le 18 janvier 1908, et Henri le 8 mars 1910 à La Barre de Sauzé-Vaussais. Fernand (décédé en 1972) sera maçon à Lussay (Chef-Boutonne) et Henri (dit Bouboule décédé en 1983) fut conducteur de camion.

 

montalembert.jpg

L'église de Montalembert (79)


La famille s’est installée à Sauzé-Vaussais en 1909 - ou 1910. Mais un drame survient en 1911. Le 7 novembre 1911 François Rouffin fait une mauvaise chute d’un échafaudage à Ruffec et meurt sur le coup, il a 77 ans


Surgissent la guerre et les années noires. Angèle Rouffin, mère de Marie-Thérèse, est poissonnière. Elle met au monde un cinquième enfant le 26 avril 1916 à La Barre de Sauzé-Vaussais. C’est une fille, Fernande (dite Suzanne) Renaud qui porte le nom de jeune fille de sa mère, et décéde en 1949. Lire ci-dessous.

 

proces_suzanne_renaud_1936-copie-1.jpg

 

Suzanne (née le 26 aril 1916) n'a pas 24 ans en 1936, mais juste 20 ans, sa mère n'est pas femme Durand (comme écrit par erreur dasn l'article ci-dessus) mais veuve Renaud et divorcée Surreau.

 

Sans doute, Fernande (dite Suzanne) n'avait-elle pas reçu de ses parents l'éducation qu'elle aurait méritée. C'est sans doute la raison qui avait poussé Marffa à déserter la maison familiale.

 

  eglise_javarzay.jpg

 

A la fin de la guerre de 14-18, Angèle Rouffin achète une petite maison (ci-dessous) à Javarzay, route d’Aubigné. Elle est marchande ambulante de sardines, on la surnomme alors « la sardinière ».


maison_angele_marffa.jpg

 

Cette maison se situait dans la rue qui mène à Aubigné (vue ci-dessus), du côté gauche (en partant de l'église), juste après la boulangerie.

 

Marcel Ducoin se souvient encore de la charrette de la sardinière tirée par un bourricot.

 

La sardinière se remarie le 28 janvier 1922 à Chef-Boutonne avec Pierre Julien Surreau, un poissonnier né le 24 octobre 1872 à Montalembert, veuf depuis le 30 septembre 1916. Les mariés devaient se connaître depuis belle lurette. Ce qui ne les empêchera pas de divorcer en 1935. Pierre Julien Surreau était camelot, il vendait des almanachs et des bricoles sur les places de marché, à Chef-Boutonne, à Sauzé-Vaussais, etc.

 

condamnation_angele_sureau-copie-2.jpg


A Javarzay, la vie est difficile d’autant que la Grande Guerre s’avère désastreuse.

 

Marie-Thérèse s’interroge… Elle a dû aller un peu à l’école7. Elle fait de petits boulots, garde des vaches, mais ne supporte pas sa condition, ni cette ambiance, et encore moins probablement son futur beau-père… A 16 ans, à la fin de l’année 1924, elle fugue…

 

marfa7.jpgPaulette, Georgette, Marffa et Georgio monté sur une caisse... en 1935.


C’est le journal L’inter forain de janvier 2005 qui nous explique sous la plume du journaliste Michel Pierre, la rencontre avec Georges Vignolles (dit Georgio). André Ravion, de Barbezières, passionné de cirque, du monde forain et d’histoire, a eu la gentillesse de nous révéler ce journal.


Mais avant, présentons ce fameux Georgio. Jean Marie Georges Raymond Vignolles, est né le 12 septembre 1896 à Toulouse d’un maçon, Raymond Vignolles, et de Marie Rosalie Biri. Il avait épousé, le 24 juin 1920, Maria Ersélia Cardinali que l’on dit Italienne. Voilà pour l’état-civil.


Michel Pierre avait fouillé bien des archives pour rédiger cet article complété par un autre sur Martha la Corse. Une bonne initiative qui permet de lever le doute et comparer ces deux dompteuses. Quant à nous, nous avons pu trouver de nombreux documents à Toulouse auprès de Paulette, fille cadette de Marffa. Des coupures de presse, des prospectus, des photographies, et nous sommes allé à la chasse aux témoignages auprès d’anciens spectateurs de « La Jungle ».


« Fils d’un marchand de poisson8 toulousain, Georges Vignolles, dit Georgio, est né en 1896 dans la « ville rose ». Il exerce différents petits métiers9. C’est ainsi qu’on le retrouve successivement apprenti coiffeur, vendeur de journaux, puis receveur de tramway… Il a alors 14 ans, mais les rails du tram ne suffisent pas à son ambition. Georgio quitte le toit familial pour vivre chez l’homme-canon, un certain Barlati. Ce dernier tient un établissement plein d’individus étranges et de truqueurs de tout acabit. Bref, une véritable « Cour des miracles »… ainsi que le rappelle L’Inter Forain dans son numéro du 20 mai 1949. Dans cet univers à la fois étrange et fascinant, l’adolescent apprend et copie tout ce qu’il voit faire et débute sur les planches comme camelot en pastichant la surprise et la poignée de bijouterie. Il devient aussi le « Roi du portefeuille » tant il en écoule…


Georgio véritable « Frégoli forain »

Quelques années plus tard, il se marie avec une belle italienne nommée Anita10 Cardinali, ouvre un magasin d’articles forains, mais cet amateur de poker perd au jeu le plus clair de son argent, si bien que la famille doit fermer boutique pour monter un… « cirque américain » qui démarre assez bien. Georgio veut alors lui donner plus d’ampleur, mais l’affaire périclite. A nouveau sans argent, il entreprend une tournée dans les cafés de la région toulousaine. Véritable « Frégoli forain », il exécute tout un programme à lui seul, avalant des clous, faisant disparaître des cartes, s’enfonçant des aiguilles dans le cou et de l’étoupe enflammée dans la bouche, chantant des chansons burlesques et imitant Monthésus.

A force d’économies, il parvient à monter une baraque d’exhibition d’animaux sauvages11. La chance revient. De courte durée… car sa belle Italienne le quitte et part avec toutes ses économies.


Rencontre avec Marffa

Cela se passe à Tours, le 9 août 1924. Deux jours plus tard, Georgio rencontre Marffa, âgée de 16 ans, qui ne sait ni lire, ni écrire12. Ils s’aiment, elle devient sa femme13 et ils partent en voyage de noces dans le Midi. Là, Marffa fait la connaissance de la fille de Giovanni qui domptait des hyènes. Celle-ci lui enseigne l’art du dressage, et en 1925, Marffa fait sa première apparition en cage à Aubagne, dans une ménagerie à son nom.

Fasciné par le courage de son "épouse", Georgio ne veut pas être en reste. Il devient donc belluaire et fait sensation par son inconséquente témérité, ignorant les dangers qu’il court.

L’année suivante, c’est à l’occasion d’un concours international14 à Ajaccio où elle présente un travail particulièrement dangereux, que Marffa est surnommée… « Marffa la Corse ». Titre qu’elle conservera sa carrière durant. Un prénom, un nom qui ressemble étrangement à celui de Martha la Corse, et qui explique peut-être pourquoi les deux femmes s’en sont voulu aussi longtemps. Vérité oblige à dire qu’en réalité elles n’étaient corses, ni l’une, ni l’autre… »

 

Marffa n’était pas corse, mais Gaston Cony, auteur d’un ancien article de l’Inter Forain, précise : « Marffa fit sa première entrée en cage à Aubagne en 1925, et ce serait en 1926, à Ajaccio, à l'occasion d'un concours international au cours duquel elle présentait un numéro extrêmement périlleux qu'elle fut surnommée Marffa la Corse, le surnom lui est resté... »

 

Nous en prenons acte en remerciant Michel Pierre d’avoir fouillé une nouvelle fois les archives du journal pour nous.


Marffa était nettement plus grande que Georgio, c’était une costaude en mesure de le toiser, qui savait s’imposer, surtout munie d’un fouet. Mais Georgio était un teigneux à la baffe facile.

 

Quittons le texte de Michel Pierre pour aller rejoindre Paulette, la célèbre « Poupée de France » qui confie : « Maman qui ne sait ni lire ni écrire15veut devenir dompteuse. Elle se fait aider de mon père pour monter une ménagerie. Lui, il a le bac (sic). Ils achètent un lion, deux serpents, trois singes. Avec le temps, la Jungle s’agrandit ».

 

L’aînée de leurs filles, Georgette, naîtra le 10 février 1926 à Toulouse. Paulette aussi dans cette même ville le 13 février 1928, deux ans après quasiment jour pour jour. Georgio visitait régulièrement sa mère16et s’arrangeait pour se trouver là lors des moments importants.

 

soeurs.jpg

 

Ecoutons nos circassions bonimenter

Paulette affirme quant à elle « être née dans la cage » à la fin d’une représentation sur la place du « marché aux cochons ». Marffa aurait trop attendu l’heureux événement, travaillant jusqu’au dernier instant. Nous ne saurons jamais si ce fait divers est réel, en tous cas, Marffa le reprendra à son compte - si elle ne l’avait déjà fait - lorsqu’en 1988 elle recevra le Courrier Picard à l’occasion d’un portrait. Nous en reparlerons plus loin.

« A partir de 3 ans, j’ai commencé à rentrer dans les cages avec ma mère pour m’habituer, et je dansais déjà devant les lions » dit se souvenir Paulette (1928-2010). « J’ai commencé à chanter à 9 ans, j’ai appris seule des chansons de Maurice Chevalier, de Fernandel... Mon père mettait un disque, j’ai d’abord chanté en play-back, je faisais beaucoup d’automate, il y eut un concours dans cette spécialité, je suis arrivée première. Mon vrai nom, c’est Lola, et c’est mon nom de chanteuse, mais ma marraine qui tenait une loterie m’avait déclarée sous le nom de Paulette17. »

Examinons des documents des années trente que Georgio conservait précieusement dans son press-book  : des coupures de presse, prospectus, affichettes, etc.

 

jungle1-copie-1.jpg

La première ménagerie La Jungle.


La ménagerie « opérait » toujours seule, sinon en association avec un petit cirque. « A la condition que les cuivres brillent, que tout soit astiqué, que l’on porte des sandalettes blanches, la ménagerie comme un produit d’appel, incitait le public à se rendre au cirque » s’illumine Paulette.

 

« Mon père domptait des animaux, au cours des spectacles il était toujours en sécurité derrière la cage avec son revolver mais ne se produisait pas avec eux, sauf avec le lion Pacha. Il mettait sa tête dans la gueule de ce fauve, mais un jour alors qu’une lionne était en chaleur, le lion n’a pas voulu desserrer les mâchoires. Heureusement, ma mère est vite rentrée, elle est arrivée à lui faire ouvrir le bec… » s’exalte-t-elle.

 

Mais les accidents n'étaient pas rares.

 

L'Ouest Eclair nous rapporte le 12 novembre 1937 cet accident survenu à la foire Saint-Martin à Angers (cliquez).

 

Ce n'était qu'un coup de griffe à l'avant-bras gauche de la part du paisible lion Pacha... Un accident sans grave conséquence puisqu'après soins le spectacle put recommencer. Brave Marffa !

 

A Melle, l'année suivante, c'est le bras droit qui sera mordu cruellement ! Mignonne n'était donc pas si mignonne...

 

echo_poitevin_accid_marffa_1938-copie-1.jpgL'accident de Melle fait référence à celui d'Angers.

ouest_eclair_accident_marffa_25_avril_1938.JPG

Ouest Eclair publie aussi cette information le 26 avril 1938 (cliquez)

 

Il y avait aussi des accidents avec le public. « En 1938 ou 39, un militaire à la foire du Trône s’est approché un peu trop près, le lion lui a donné un coup de patte. » selon Paulette.

 

L’établissement « La Jungle », c’était un train de véhicules dont certains sur des roues à jantes en bois. Pour les longs déplacement Georgio affrétait des wagons de chemin de fer.

« Des remorques pour les cages et les fauves, on levait les bâches, des caravanes, une pour mes parents, l’autre pour les filles et Maousi, et une remorque pour les employés » précise Paulette (1928-2010). « La nourriture des bêtes, nous la trouvions dans les abattoirs, parfois les équarrissages. L’école, on y allait un jour sur deux, le plus souvent un seul jour par semaine, quand on faisait des foires d’un mois, quand on était en ville morte tout seuls sur un champ de foire. »


« La Jungle » écume les foires de Roanne, Brive, Angers, Bordeaux, Toulouse, et celles plus modestes du Poitou-Charentes… Les 11 et 12 août 1935 elle s’installe à Touzac (le département n’est pas cité, en Charente probablement près de Cognac) à l’occasion de la fête patronale.

 

Le prospectus est formel :

« Nous avons le plaisir de vous montrer la grande ménagerie provençale « La Jungle » de la célèbre dompteuse Marffa la Corse, et nous pouvons dire que cet établissement a fait les plus belles recettes aux fêtes de Jonzac, Angoulême et Bordeaux, etc. Nous pourrons y remarquer la plus jeune dompteuse du monde, Miss Paulette âgée de 5 ans, avec ses loups ; Miss Georgette, 8 ans, avec une collection de 15 serpents boa ; la dompteuse Marffa la Corse avec ses lions, et le célèbre dompteur Georgio, qui fait courir les foules ».


Le dimanche 14 juin 1936, « La Jungle » est à Ruffec pour la Saint Barnabé et se baptise désormais « Ménagerie Lorraine ».

« La Jungle » dimanche 14 juin 1936, à 21h30, grande soirée de gala. A la suite d’un pari, M. Marcel Morel, propriétaire du Café de Plaisance, s’engage à entrer dans la cage aux lions où il fera une partie de cartes au milieu d’eux. Que fera le roi du désert en présence de cet audacieux ? Amateurs d’émotions fortes, accourez à cette grande soirée. 1.000 places assises... »


Mille places assises (sic), une origine géographique qui change dans chaque ville, nous ne sommes pas au bout de nos surprises avec Georgio.


Le mercredi 30 septembre 1936, « La Jungle » se pose à Thouars !

« Grande soirée de gala, à la suite d’un pari, M. Marcel Garrau, garçon coiffeur à Thouars, s’engage à rentrer dans la cage aux lions et y raser le dompteur. Que fera le roi du désert en présence de cet audacieux ? La soirée du 30 septembre nous l’apprendra, amateurs d’émotions fortes, accourez à cette grande soirée, place du champ de foire à 21 heures… »


Le 10 janvier 1937, « La Jungle » relâche à Blaye.

« Grande matinée de gala, avec le concours de MM. François Hébrard, du café de Bordeaux, et Roger Légerat, charcutier, qui après un défi original, doivent faire une partie de belote au milieu des lions. S’ils y réussissent, M. Barsac, pâtissier, doit leur servir une coupe de champagne. Il sera intéressant de savoir si ces intrépides dompteurs pourront finir leur partie de belote au milieu de l’instinct sauvage de ces maîtres du désert. A noter que les lions sont à Blaye depuis le 26 novembre et que depuis, ils n’ont jamais travaillé. Que fera le roi du désert en présence de ces audacieux ? Cette matinée nous l’apprendra ! Prix des places : réservées, 6 fr. ; premières, 5 fr. ; secondes, 3 fr. Réduction pour les enfants. »


Le jeudi 18 février 1937, « La Jungle » a rejoint Villeneuve-sur-Lot !

« Grande soirée de gala au profit du bureau de bienfaisance de la ville de Villeneuve avec le concours de M. Roger Fourcade, commerçant, de Fernand Ernst, bar Saint-Michel, qui après un défi original, doivent faire une partie de belote au milieu des lions, la partie sera arbitrée par M. Tesquet, loueur de taxis. S’ils y réussissent, la célèbre dompteuse Marffa la Corse leur servira une coupe de champagne. Il sera intéressant de savoir si ces intrépides dompteurs pourront finir leur partie de belote au milieu de l’instinct sauvage de ces maîtres du désert. Que fera le roi du désert en présence de ces audacieux ? Prix des places : premières, 5 fr. ; secondes, 4 fr. Réduction pour les enfants. »


Le 8 mai 1937, le maire de Niort autorise « La Jungle » à organiser une soirée de gala dans sa ville le lundi 10 mai, mais sous la propre responsabilité de son directeur. La ville n’entend pas être mise en cause pour les accidents qui pourraient survenir « avec le concours de particuliers devant opérer au milieu des fauves ». Elle remercie à l’avance Georgio de reverser 25% des recettes au bureau de bienfaisance.


Le 8 mai 1937, une lettre du maire de Ruffec donne son « autorisation pour la manifestation du 13 juin suivant et remercie à l’avance, au nom du bureau de bienfaisance, Georgio de sa généreuse initiative de verser une partie de la recette pour les nécessiteux de la ville. »


Ainsi le dimanche 13 juin 1937, « La Jungle » est de retour à Ruffec pour la Saint Barnabé :

« Grande soirée de gala à 21 heures, avec le concours de la société musicale de Ruffec. Marffa la Corse présentera sa superbe collection de 15 lions18, avec le concours de trois amateurs bien connus qui feront une partie de belote en 700 points au milieu des lions. Ces amateurs sont M. Marcel Morel, Café de Plaisance ; M. Joseph Marfil, garagiste ; le troisième étant un notable de la ville ne se dévoilera qu’en présence du public. Tinouche chantera au milieu des lions des chansons de son répertoire. Accourez à cette grande soirée de bienfaisance. »


Le Journal de Ruffec sous la plume de R. Delouche rendra compte de l’événement non sans humour :

« On dit que la Société Musicale de Ruffec, après les intrépides exécutions devant panthères, lionnes et hyènes, vient d’être engagée à prix d’or par une société anonyme de charmeurs de boas…

On dit qu’un jovial distillateur malgré l’insistance du « Roi des Dompteurs », a décidé, après avoir pesé le pour et le contre et fait ses comptes, de ne pas abandonner le commerce des panachés pour l’exhibition chez les fauves…

On dit que Marfil, chaque fois qu’il volait 100 points à son inévitable partenaire Morel, se retournait, livide, vers le lion, pour voir si ce dernier ne s’en était pas aperçu…

On dit pour finir, puisqu’il faut finir sur une apothéose, que l’universelle fantaisiste Tinouche, non contente d’avoir inauguré la dangereuse plongée vélocipédique sur bitume, vient de faire breveter un nouveau procédé de solfège à l’usage des lions… »


Le Journal de Ruffec informe la population que « la direction de la ménagerie « La Jungle » a, sur le produit des entrées, versé la somme de 250 francs au profit du bureau de bienfaisance ». L’Avenir Républicaindonne également cette information à ses lecteurs.

 

lola_serp.jpgPaulette et ses serpents... un jour où elle reçut des baffes.


Un prospectus non daté, et peu enclin à la modestie, donne quelques précisions supplémentaires :

« Marffa la Corse, la seule femme au monde qui lutte avec les lions19, groupe de fauves des cinq parties du monde, 15 lions, groupe d’animaux de toutes races et toutes provenances. Au programme de ce soir : 4 dompteurs, 8 entrées de cage, 2 dompteuses, Marffa la Corse présentera la terrible lionne Olga qui a dévoré le dompteur Adam le 5 avril 1937 à Paris ; le maître des fauves, le célèbre dompteur Georgio présentera les grandes chasses aux lions. Collection unique de serpents et de singes. La direction achète des animaux hors service pour la nourriture des animaux… »


Le 11 novembre 1937, « La Jungle » est à Angers et pose face à la foule sur la photographie qui illustre un article à sensation : « La foire Saint-Martin s’ouvre devant une foule nombreuse. Une dompteuse est blessée par un lion ». Une fois de plus… 


L'année suivante c'est Marffa elle-même qui sera blessée à Melle : lire plus haut l'Accident du 25 avril 1938.

 

Le vendredi 17 juin 1938, « La Jungle » est à Brive :

« Grande soirée de gala sous le patronage de la municipalité, au profit de la caisse des écoles, colonies de vacances, avec le concours de deux commerçants de la place de la Guierle, qui, après un défi original, doivent déguster une bouteille de champagne au milieu des lions. Leur nom sera dévoilé au public ! Que feront les rois du désert en présence de ces audacieux amateurs ? … avec la Poupée de France qui fait courir tout Brive pendant les foires. Il est prudent de retenir ses places à l’avance… »

 

Le maire de Brive se fend d’une lettre de félicitations.

« Jointe à votre remarquable talent, à celui de votre femme, à la gentillesse charmante de vos deux fillettes, à la meilleure tenue, enfin de toute votre troupe et de toutes les parties de votre programme, votre heureuse initiative en faveur des plus malheureux vous aura permis de conquérir d’emblée le cœur des brivistes qui aiment par dessus tout les âmes braves et généreuses… Vous reviendrez nous voir car on n’oublie pas une ville aussi charmante, et vous y trouverez toujours le même accueil de chaleureuse bienvenue… »

 

Cette lettre explique le rôle des galas de bienfaisance qui permettaient de s’assurer à coup sûr une belle place sur le champ de foire lors d’un prochain passage.

 

Le dimanche 17 juillet 1938, « La Jungle » est installée à Roanne. Le lundi elle donne « une grande soirée de gala à 21 heures sous le patronage de la municipalité au profit de la caisse des écoles, colonies de vacances, avec le concours de deux amateurs bien connus, un sympathique cafetier de la place et M. Reure dit Tonton, qui après un défi original doivent faire une partie de belote au milieu des lions. Que fera le roi du désert en présence de ces audacieux amateurs ? » Cette soirée a dû connaître le succès puisque dès le 19 juillet, le maire de Roanne adresse une lettre de remerciement à Georgio pour avoir fait don à « l’œuvre des enfants de la montagne de la ville de Roanne » la somme de 620 francs. Fait attesté par le journal local Le Mémorial qui se félicite :

« Comme nous l’avions prévu, la soirée de bienfaisance organisée hier soir par M. Georgio, directeur de « La Jungle » a connu le succès, et mis hors de cause les deux amateurs. L’attention du public fut plus particulièrement retenue par la jeune vedette baptisée « Poupée de France ». Aussi, cette charmante enfant - elle n’a pas 9 ans - a bien voulu réserver une dernière faveur aux Roannais. En effet, ce soir, à 21 heures, au café Bonnet, place de la Loire, « Poupée de France » dans son dernier répertoire. Pour assister à ce dernier gala de la fête, il y aura foule, car, comme hier, c’est à une bonne œuvre que le public sera invité à collaborer. »


Robert Patient20se souvient de Marffa la Corse à Segonzac : « Je l’ai bien connue, voici une anecdote qui fit grand bruit à l’époque concernant un citadin, M. Rivet, boucher à Segonzac, prit le pari d’entrer dans la cage aux lions avec Marffa. Ce qui fut fait et donna à son cirque une renommée extraordinaire ». Le public était naïf, comme à son habitude.

« Pendant la guerre, à Bordeaux nous étions près du cirque Amar » relate Paulette, les Amar étaient jaloux tellement nous avions du succès, ils ont tué un poulet et souillé un bandeau qu’ils ont fait porter à un de leurs dompteurs pour faire croire à un accident chez nous, ils voulaient nous voler notre public… Puis les Amar ont fait circuler leurs éléphants devant la ménagerie pour faire fuir le public. C’est aussi à Bordeaux qu’un commandant allemand avait empoisonné notre chien danois Roméo parce qu’on avait pas voulu lui vendre. »


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